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  • Ladida : Peut-on réellement parler de "reprise" quand les taux de croissance atteignent à peine 1,5 % ?

Xavier Timbeau : C'est une question pertinente. On peut parler d'une amélioration relative de la situation économique quand on la compare à la chute brutale de l'activité fin 2008 et début 2009. Il y a quelque chose qui a changé, clairement. En revanche, utiliser le mot "reprise" dans le sens "la crise est terminée", c'est une erreur de jugement. La crise est loin d'être finie. La meilleure façon de le constater est que l'activité en France, comme dans beaucoup de pays, reste beaucoup plus basse qu'elle ne l'était au début de l'année 2008.

Et une trajectoire de croissance de 1,4 % ne se traduira que par un retour très lent à ce niveau d'activité. Surtout, le taux de chômage va rester au niveau très élevé où il est, et ne va pas amorcer de décrue. Donc, dans ce sens, penser que la reprise signifierait la fin de la crise, c'est se tromper complètement.

  • Kouzbe : Le pire de la crise est-il derrière nous ? Aucun risque de rechute ?

Xavier Timbeau : Le pire de la crise, le moment où rien ne semblait pouvoir s'arrêter, est derrière nous. Mais il est légitime de s'interroger sur la possibilité d'une réplique, en quelque sorte, de la panique financière qu'on a connue tout au long de 2008-2009. Il y a trois grandes raisons qui pourraient déclencher une telle réplique.

La première, c'est qu'il resterait encore dans les bilans bancaires des dépréciations et des actifs toxiques, ceux-là mêmes qui ont provoqué la crise et qui, donc, ne sont pas totalement absorbés.

La deuxième raison, c'est que le déroulement de la crise et sa diffusion à l'ensemble de l'économie vont induire de nouvelles dépréciations pour les banques et les institutions financières. Ce sont des entreprises qui vont faire défaut, qui vont faire faillite ; ce sont des ménages qui feront défaut sur de la dette immobilière. C'est un processus beaucoup plus long que celui qui a lieu sur les marchés financiers, mais qui peut peser lourdement sur des bilans bancaires déjà fragilisés.

La troisième raison, c'est qu'une grande partie des conséquences de la crise a été mise de côté, absorbée par la dette publique, et que cela engendre une mécanique et une menace. La mécanique est celle de la réduction de la dette publique et des déficits, qui va peser sur la croissance dans les années qui viennent. La menace, c'est que l'on perde confiance dans la dette de certains Etats, a priori plutôt de petits Etats, et que cette perte de confiance induise des crises de dette souveraine. Ces crises auraient des conséquences sur l'ensemble des économies globalisées. Un petit Etat qui pourrait être dans ce cas, c'est par exemple la Grèce, mais ce peut être aussi les pays baltes.

Cela dit, il existe des moyens d'empêcher cette perte de confiance, par exemple un soutien qui serait apporté à ces pays, soit par le FMI, soit par l'Union européenne.

  • Benoît : L'économie française va-t-elle repartir plus vite ou plus lentement que celle de nos voisins européens ?

Xavier Timbeau : Très honnêtement, je n'en sais rien. Et je pense que ce n'est pas très important. La France apparaît pour le moment avoir été moins touchée par la crise, mais c'est une consolation maigre et un peu dérisoire, car dans une économie aussi globalisée que la nôtre, on ne peut pas échapper à une crise globale.

La France a probablement quelques avantages institutionnels, comme un système de protection sociale qui couvre mieux que dans d'autre pays. Mais pour que cela continue, il va falloir prendre un certain nombre de décisions. Par exemple, décider ou non de prolonger les allocations-chômage au-delà de la période maximale de vingt-trois mois, pour éviter qu'à la fin de l'année 2010 on se retrouve avec une immense masse de chômeurs en fin de droits qui, par leur perte de revenu, pourraient provoquer un nouveau ralentissement de l'économie.

  • Nicolas : Selon vous, combien faudra-t-il de temps pour que cette reprise ait un impact sur les chiffres du chômage ?

Xavier Timbeau : Là aussi, il est difficile de donner une réponse très précise. Ce qu'on sait de l'observation dans le passé et dans les autres pays de crises d'ampleur comparable, c'est qu'il faut, pour revenir à un taux de chômage bas, des durées de l'ordre de quatre à six ans.

C'est en moyenne le cas dans de nombreux pays qui connaissent des crises bancaires ou des crises de change. Ce n'est pas directement le cas français dans la crise financière actuelle, mais cela donne un ordre de grandeur de ce qui peut se passer en termes de chômage. Pour la France, un taux de chômage plus élevé pendant au moins cinq ans paraît aujourd'hui l'estimation la plus optimiste.

  • Wilfried : A-t-on un jour espoir de respecter de nouveau les seuils fixés par Maastricht ?

Xavier Timbeau : Il y a deux seuils fixés par Maastricht : le premier est le déficit public, et le second est le seuil de dette publique rapportée au PIB. Le premier seuil est à 3 %, et le second à 60 %. On reviendra dans un avenir proche – quelques années – à un déficit en dessous de 3 %, et cela permettra de stabiliser la dette publique. En revanche, la dette publique aura considérablement augmenté et pour revenir à un ratio de dette publique de 60 % dans le PIB, il faudrait, si l'on décidait de le faire, plusieurs décennies pour y arriver.

  • Bbb : Quels pays vont désormais être les moteurs de la croissance mondiale ?

Xavier Timbeau : Certains pays ont des croissances très fortes : la Chine, l'Inde, le Brésil, qui sortent relativement indemnes de la crise. Une crise qui, en fait, touche principalement les pays développés. Ces pays vont donc très fortement contribuer à la croissance de l'économie mondiale. Par ailleurs, le moteur de l'économie mondiale reste les consommateurs des pays développés. Même s'ils semblent moins contribuer à la croissance mondiale, leur poids dans la consommation totale est telle qu'ils sont des acteurs incontournables de l'économie.

 

 

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Tag(s) : #INFOS SYNDICALES
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